Le cadre réglementaire de l’affichage environnemental textile

Depuis 2020, un cadre législatif encadre l’impact environnemental du textile. Découvrez les règlementations clés de l’affichage environnemental.

Introduction : pourquoi un affichage environnemental textile ?

La production textile affiche un lourd passif environnemental : elle concentre à elle seule 20 % de la pollution mondiale de l’eau et 10% des émissions de gaz à effet de serre. L’essor de l’ultra fast fashion, qui alimente une course effrénée aux volumes, accentue encore cette dérive. À ce rythme, la production mondiale pourrait croître de plus de 150 % d’ici 2030.

Un paradoxe, alors même que les attentes des consommateurs vont dans la direction opposée. Soixante pour cent d’entre eux déclarent vouloir adopter des modes de consommation plus durables, et sept sur dix se disent prêts à changer de marque pour privilégier un produit à moindre impact (1).

C’est à la croisée de cette double pression écologique et sociale qu’intervient l’affichage environnemental. Conçu comme un outil commun, il vise à lutter contre le greenwashing encore pratiqué par certains acteurs et à rééquilibrer le rapport d’information entre marques et consommateurs.

Espéré comme le « Nutri-score » de l’industrie textile, ce dispositif introduit le calcul du coût environnemental. Volontaire pour l’instant, il pourrait bien marquer le début d’un changement de paradigme pour le secteur.

Mais l’ambition, aussi évidente à énoncer qu’essentielle à poursuivre, se révèle difficile à concrétiser. Fournir aux consommateurs une information claire, comparable et scientifiquement robuste sur l’impact environnemental des produits suppose de surmonter de nombreux obstacles techniques, économiques et organisationnels.

Reste à comprendre comment cette ambition se matérialise dans la loi. Car l’affichage environnemental n’est plus un simple projet : de l’AGEC à la loi Climat et Résilience, jusqu’au décret de 2025, il repose désormais sur un socle juridique qui en fixe les contours et les premières obligations pour le textile.

1. Les fondements légaux de l’affichage environnemental : du Grenelle de l’environnement à la loi Climat & Résilience

L’ambition d’un affichage environnemental ne date pas d’hier. Dès 2009, le Grenelle de l’environnement ouvrait la voie en posant pour la première fois l’idée d’informer les consommateurs sur l’empreinte écologique des produits.

Il faudra cependant attendre plus d’une décennie pour que cette vision se traduise dans la loi. En 2020, la loi Anti-gaspillage pour une économie circulaire (AGEC) inscrit noir sur blanc le principe d’une information environnementale appliquée aux biens de consommation.

Un an plus tard, la loi Climat et Résilience donne une nouvelle dimension à ce projet. Son article 2 trace les contours d’un dispositif d’affichage obligatoire dans plusieurs filières pilotes, dont le textile, avec une exigence claire : fournir aux consommateurs une information « fiable, comparable et vérifiable » sur l’impact environnemental des produits tout au long de leur cycle de vie.

Le décret n°2025-957 du 6 septembre 2025 vient concrétiser cette ambition et la traduire en cadre opérationnel. Avec une nuance de taille toutefois : l’affichage environnemental n’est pas rendu obligatoire. Il reste volontaire, mais est strictement encadré. Autrement dit, toute communication doit respecter les règles de calcul et de présentation définies par le décret. Celui-ci précise les obligations qui s’imposent aux entreprises et confie à l’ADEME la responsabilité de piloter le dispositif et d’en garantir la cohérence.

2. Le rôle central de l'ADEME

Impossible de parler d’affichage environnemental sans évoquer l’ADEME. Chef d’orchestre du dispositif, l’Agence de la transition écologique en garantit à la fois la crédibilité scientifique et la cohérence opérationnelle. En assurant l’uniformisation des pratiques, elle permet d’éviter la prolifération de labels privés aux méthodologies disparates.

Après avoir piloté la phase d’expérimentation, elle travaille aujourd’hui avec la start-up d’État Ecobalyse pour construire une méthodologie de calcul servant de référence commune.

Elle administre également la plateforme nationale destinée à recueillir les données transmises par les entreprises. Qu’il s’agisse du gabarit officiel, des modalités de calcul ou de la conformité des informations communiquées au consommateur, elle s’assure que les marques respectent le cadre réglementaire.

  • ADEME – site officiel sur l’affichage environnemental.
  • ADEME, rapports méthodologiques (2022-2024).

3. Statut actuel et calendrier

2009
Grenelle de l'environnement

L’idée d’un affichage environnemental apparaît pour la première fois, avec la volonté de sensibiliser les consommateurs à l’impact écologique des produits.

2020
Loi AGEC

La loi Anti-gaspillage pour une économie circulaire inscrit officiellement dans le droit français le principe d’une information environnementale sur les biens de consommation.

2021
Loi Climat & Résilience

L’article 2 fixe un cadre précis pour la mise en place progressive d’un affichage environnemental obligatoire dans plusieurs filières pilotes, dont le textile. L’objectif est clair : rendre l’information « fiable, comparable et vérifiable ».

2022-2024
Expérimentations encadrées par l’ADEME

Des tests grandeur nature sont menés dans le textile, l’alimentaire et l’hôtellerie afin d’affiner la méthodologie et d’évaluer la lisibilité des formats proposés.

09/06/25
Decree No. 2025-957

Le décret, publié au Journal officiel le 9 septembre, précise les modalités de calcul et de communication du coût environnemental pour les textiles d’habillement.

10/01/25
Entrée en vigueur pour le textile

Le dispositif devient applicable. L’affichage n’est pas obligatoire mais il est désormais volontaire encadré : toute communication doit respecter les règles fixées par le décret et passer par la plateforme nationale gérée par l’ADEME.

10/01/26
Nouvelle étape

Les tiers (distributeurs, plateformes, comparateurs) pourront à leur tour afficher le score environnemental des produits, à partir des données disponibles. Parallèlement, l’Europe avance vers une harmonisation du calcul d’impact environnemental avec l’introduction du PEF en usage B2B, le règlement ESPR, la directive Green Claims et le futur passeport numérique produit.

4. Les entreprises et produits concernés par l’affichage environnemental textile

Le décret de septembre 2025 précise clairement le champ d’application de l’affichage environnemental.

Il vise les fabricants, importateurs et metteurs sur le marché français de produits textiles. Par “mise sur le marché”, on entend la première mise à disposition d’un produit sur le marché national français.

Quant aux produits, le périmètre est volontairement limité. Le texte s’applique uniquement aux produits textiles d’habillement, qu’ils soient neufs ou issus du remanufacturage. Nécessitant d’autres approfondissements méthodologiques, les chaussures et autres articles textiles n’entrent pas dans le champ d’application à ce stade.

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Le périmètre exact est défini par arrêté conjoint des ministres chargés de l’Économie et de l’Environnement, en cohérence avec le règlement européen sur l’étiquetage des fibres textiles (UE n°1007/2011).

À noter que l’affichage environnemental ne se limite pas au textile. D’autres secteurs pilotes, comme l’alimentaire ou l’hôtellerie, sont également engagés dans cette démarche.

Notre module s’adresse néanmoins en priorité aux marques de textile, dont le secteur est le premier directement concerné par l’entrée en vigueur du décret.

Acteurs concernés

Fabricants, importateurs, metteurs sur le marché français

Champ géographique

Tout produit mis sur le marché en France

Produits couverts

Exclusivement les produits textiles d’habillement, neufs ou issus du remanufacturage

5. Les règles et obligations pratiques de l’affichage environnemental

1. Les données doivent être collectées, fiabilisées et transmises à l’ADEME

Pour que le score environnemental reflète la réalité, les marques doivent s’appuyer sur des données fiables, vérifiables et complètes, évitant les approximations ou valeurs par défaut (“proxy”) qui majorent le score final. La précision des informations transmises conditionne directement la crédibilité et la valeur du calcul.

Les données doivent être :

  • Prouvées, à l’aide d’éléments vérifiables : analyses de cycle de vie (ACV), certificats, preuves de traçabilité, etc.
  • Transmises à la plateforme nationale administrée par l’ADEME avant toute communication publique.

Chaque fiche produit doit être calculée selon la méthodologie Ecobalyse (alignée sur la PEF et enrichie de paramètres spécifiques au textile) et faire l’objet d’un dépôt de données sur le portail ADEME : identification du produit, version méthodologique, date du calcul et décomposition par catégories d’impacts.

👉

Les données déposées peuvent être rendues publiques, conformément à la logique de transparence du dispositif.

2. La communication du coût environnemental doit respecter un cadre strict

Les règles de communication garantissent la comparabilité entre marques et empêchent toute présentation trompeuse. Les entreprises ne peuvent pas adapter librement le format ou sélectionner uniquement les indicateurs qui les avantagent.

Le format officiel doit être respecté

Le coût environnemental doit être présenté selon le gabarit fixé par arrêté ministériel (format, pictogramme, unité).

L’information doit être visible au moment de l’achat, en ligne comme en magasin, et reproduite à l’identique sur tous les supports.

Aucune adaptation graphique, simplification ou reformulation n’est autorisée : le consommateur doit pouvoir comparer deux produits sur une base identique.

Les marques doivent publier des scores d’impact environnemental complets

Lorsqu’une marque communique un indicateur isolé (par exemple l’empreinte carbone ou l’usage de l’eau), elle doit accompagner ces données du coût environnemental complet calculé selon la méthodologie officielle de l’ADEME.

Cette exigence empêche toute communication sélective (“green cherry-picking”) et garantit une lecture globale de l’impact.

Les données doivent être cohérentes et tracées

Le score affiché doit correspondre exactement à la version déposée sur la plateforme ADEME.

Toute divergence entre le score communiqué et les données enregistrées constitue un manquement à la loi.

Le coût environnemental des produits textiles doivent être actualisés régulièrement

Le dispositif impose un suivi régulier de la qualité et de l’actualité des données. L’affichage environnemental ne doit jamais reposer sur des informations obsolètes ou partielles.

  • Les données doivent être actualisées au moins une fois par an, et à chaque évolution significative du sourcing, du mix matière ou du procédé industriel.
  • Le coût environnemental peut être recalculé tous les trois mois au maximum.
  • En cas d’évolution de la méthodologie officielle, le score doit être mis à jour dans un délai maximal de douze mois.
  • Les entreprises doivent conserver la traçabilité complète des calculs, sources et justificatifs associés.

3. Les manquements à la loi entraîneront des sanctions

Le respect du dispositif est strictement encadré. Les données et les communications peuvent faire l’objet de contrôles par l’ADEME et la DGCCRF.

Une information incomplète, erronée ou non conforme peut être qualifiée de pratique commerciale trompeuse au sens du Code de la consommation (articles L121-2 et suivants).

Les entreprises s’exposent à :

  • des amendes administratives,
  • des contentieux pour non-conformité ou fausse déclaration,
  • la suspension du droit de communication du coût environnemental.

6. Vers une harmonisation européenne

Si le cadre réglementaire français constitue aujourd’hui la référence pour le textile, il s’inscrit dans une dynamique plus large à l’échelle de l’Union européenne.

En mars 2025, le secrétariat technique du PEF (Product Environmental Footprint) a recommandé de limiter l’usage du score unique à la sphère B2B. Trop complexe pour être compris du grand public, ce référentiel est pensé comme un outil technique d’harmonisation, destiné à faciliter les échanges de données environnementales entre marques, distributeurs et fournisseurs.

Cette orientation contraste avec le choix français d’un affichage visible par le consommateur. Les entreprises devront donc composer avec deux cadres complémentaires : un affichage B2C encadré par le décret français, et le PEF en usage B2B au niveau européen.

À horizon 2026, plusieurs textes en cours de discussion – le règlement ESPR (écoconception), la directive Green Claims et le futur passeport numérique produit (DPP) – devraient permettre d’aboutir à une méthodologie commune. L’objectif est clair : prévenir le greenwashing et éviter les distorsions de concurrence au sein du marché intérieur.

Conclusion

L’affichage environnemental textile ne relève plus du simple projet politique : il s’appuie désormais sur un socle légal solide, de l’AGEC à la loi Climat et Résilience, jusqu’au décret de septembre 2025. Pour les marques, ce dispositif doit être considéré comme une étape incontournable. Il s’inscrit dans une trajectoire plus large qui mènera, à l’échelle européenne, à l’harmonisation avec le PEF, le règlement ESPR et le futur passeport numérique produit.

Anticiper dès aujourd’hui, c’est sécuriser sa conformité, éviter les risques de sanctions et surtout garder la maîtrise de sa communication face à des tiers de plus en plus impliqués dans la diffusion des données.

Reste une question centrale : comment calculer concrètement ce coût environnemental ? Car si le cadre juridique est désormais fixé, la méthodologie de calcul – pilotée par l’ADEME et Ecobalyse – constitue la clé de voûte du dispositif. C’est l’objet du guide suivant de ce module, qui vous permettra de comprendre pas à pas les règles méthodologiques de l’affichage environnemental.

(1) Kantar sustainability sector Index report, 2025

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Résumé

L'affichage environnemental textile constitue une avancée majeure en matière de transparence et de responsabilité dans l’industrie de la mode. Issu de la loi AGEC (2020), de la loi Climat et Résilience (2021) et du décret 2025, il met en place un cadre standardisé permettant d’évaluer et de communiquer l’impact environnemental des produits textiles.

Le dispositif, piloté par l’ADEME et fondé sur la méthodologie Ecobalyse, oblige les marques à collecter, vérifier et transmettre des données détaillées sur l’ensemble du cycle de vie des produits, des matières premières à la fin de vie du produit, afin de produire un score fiable et comparable.

Bien que l’adhésion soit encore volontaire, toute communication doit respecter strictement les règles officielles afin de garantir la rigueur scientifique du système et d’éviter toute forme de greenwashing.

Au-delà d’un enjeu de conformité, l’Éco-score représente un tournant stratégique pour le secteur textile. Il fournit aux consommateurs une information claire et harmonisée, et pousse les marques à améliorer la qualité de leurs données, la traçabilité de leur chaîne d’approvisionnement et leur performance environnementale.

En pionnière, la France ouvre la voie à une convergence progressive avec les réglementations européennes à venir: ESPR, Green Claims Directive, Passeport Produit Numérique - vers un futur cadre européen unifié pour la communication environnementale des produits.

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